Vous êtes jeune.
Vous êtes en bonne
santé.
Vous avez un travail.
"Ca
ne va pas trop mal pour moi, merci..."
Il vous vient l'envie
d'assister au concert d'un chanteur de rock qui fait carrière depuis
30 ans
et que vous avez apprécié
sur certains disques.
Car celui-ci se produit
justement dans la plus grande salle de spectacle de votre ville natale.
C'est une salle moderne,
construite avec l'argent de la ville et de l'état,
qui s'adresse au grand
public, et qui fonctionne depuis 5 ans.
L'organisation et les
conditions de sécurité sont donc nécessairement excellentes.
Vous allez passer une
très bonne soirée !
"Cool
!"
Vous achetez votre billet,
vous entrez.
Il y des places assises
au fond, mais pour mieux voir et bouger, vous prenez une place debout à
10 ou 15 mètres de la scène. Vous remarquez que les colonnes
de hauts-parleurs sont situées bien au-dessus du public, de part
et d'autre de la scène. Aucun risque pour les gens de s'en approcher
de trop près : c'est bien.
Le concert commence. Après
la première partie d'un groupe local,
c'est au tour de la vedette.
La performance scénique est très bonne et la musique pas
mauvaise.
Le son quant à
lui est sursaturé et fort.
Le lendemain, au travail,
vous vous apercevez que vous entendez beaucoup moins bien.
Les jours suivants, vous
récupérez peu à peu votre acuité auditive.
Mais il y a quelque chose
qui ne va pas : les bruits sont agressifs, ils vous font mal.
Et vos oreilles sifflent
toujours.
"C'est
tout de même inquiétant."
Vous allez voir votre
médecin. Il vous prescrit un médicament. Rien ne change.
Il vous envoie vers un
spécialiste de l'audition. Celui-ci vous révèle que
la salle du concert cause
de nombreux traumatismes
auditifs. C'est très sympa de l'apprendre après coup !
Il vous prescrit un autre
médicament, puis vous fait passer des examens :
"ne vous inquiétez
pas, tout est normal".
Le traitement dure maintenant
depuis 6 mois, mais entendre vous fait toujours terriblement souffrir.
A cause de cela, vous
avez peu à peu renoncé à tous vos loisirs.
Et vos sifflements vous
empêchent de dormir.
Le travail, l'humeur
et le moral en pâtissent sévèrement.
"Mais
qu'est-ce qui m'arrive enfin ?"
Finalement le spécialiste
vous prescrit un autre traitement qui n'a aucun effet positif.
Puis il vous dit qu'il
ne peut plus rien pour vous, qu'il ne peut pas savoir si tout cela va s'arrêter
un jour.
"Au revoir monsieur".
"Mon
dieu, c'est impossible !"
Le monde s'écroule
sous vos pieds. Votre seul avenir est l'isolement et la souffrance.
Votre esprit se referme
progressivement sur la douleur et les sifflements obsédants.
Le suicide vous apparaît
comme la seule issue à cette situation infernale.
"Je
souffre trop, que cela cesse !"
Grâce à une
association, vous découvrez enfin la vérité.
Vous n'êtes pas
un cas isolé, vos maux sont très courants,
bien qu'ils indiffèrent
les médecins et les autorités de votre pays.
Les concerts en sont
souvent la cause.
Des jeunes comme vous
témoignent dans le journal de l'association.
Comme vous, ils sont
les victimes de "professionnels" du spectacle
qui ne peuvent ignorer
les dommages catastrophiques causés par leurs pratiques.
Ce qui est infligé
à ces personnes
qui assistaient simplement
à un concert pour se divertir
est ignoble et révoltant.
Elles pensaient naturellement
être en sécurité lors du spectacle, mais ce droit élémentaire
a été bafoué.
Elles sont les victimes
d'actes gratuits (pourquoi pousser le son aussi fort ?), graves, cruels
et irréversibles.
Et les médecins,
les pouvoirs publics : où sont les contrôles, l'information,
la prévention ?
Qui connaît les
mots "acouphènes" et "hyperacousie" ?
Qui sait les ravages
qui se cachent derrières ces termes ?
"Suis-je
bien en France, en 1999 ?"
La colère et les
antidépresseurs vous rendent un peu de forces.
Alors,
définitivement révolté, vous crééz ce
site.
Vous
révélez tout, votre histoire, vos pensées, votre intimité.
Car
le temps n'est plus à la pudeur et aux précautions oratoires.
Il
est à l'urgence.
Pour que la vie
d'autres personnes ne soit pas gâchée.
Pour que les victimes
soient reconnues et aidées.
Pour que les préjudices
soient réparés.
[page précédente]
[sommaire]